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Le 1er trimestre 2021 aura été dominé par les surprises

Un plan de relance de 1.900 milliards de dollars aux Etats-Unis, des investisseurs individuels ligués contre des fonds d'investissement, une envolée des cours du pétrole, des oeuvres d'art numériques vendues pour des dizaines de millions de dollars et une chute des marchés obligataires: les trois premiers mois de 2021 ont été animés par des événements inattendus.

Mais la tendance de fond, un an après le début de la pandémie due au coronavirus, a aussi été influencée par le déploiement des vaccins, un facteur essentiel du retour à la normale de l'économie mondiale.

Ce contexte a permis aux cours du pétrole de connaître leur meilleur début d'année depuis 2005 avec un bond de près de 25% tandis que les actions mondiales atteignaient de nouveaux plus hauts EURONEXT:IACWI, même si certaines vedettes de Wall Street, comme Tesla TSLA, ont cédé du terrain depuis le 1er janvier.

Les marchés obligataires, eux, ont subi leur pire période depuis le "taper tantrum" de 2013, avec des baisses de 6% à 6,5% pour les bons du Trésor américains et le Bund allemand et de 7% pour la dette émergente.

Ce mouvement s'explique par l'arrivée d'une majorité démocrate au Sénat américain, qui a ouvert la voie au méga-plan de relance de l'administration Biden avec pour corollaire une remontée des anticipations de croissance et d'inflation ainsi que des spéculations sur un possible resserrement anticipé de la politique monétaire de la Réserve fédérale.

Les répercussions de ce mouvement ont été multiples: par rapport à leurs plus hauts de janvier-février, des fonds ou des valeurs perçus comme dépendants de l'innovation, tels l'ARK Innovation Fund ARKK, Tesla TSLA, le secteur de l'énergie solaire, celui des biotechnologies ou encore les SPAC, ont perdu entre 20% et 30%.

Le dollar, lui, a déjoué les prédictions de forte baisse qui s'étaient multipliées fin 2020 avec la perspective d'un creusement des déficits américains: il a au contraire enregistré son meilleur premier trimestre depuis 2015 et son meilleur trimestre tout court depuis 2018.

La hausse du pétrole a parallèlement profité au dollar canadien et à la couronne norvégienne tandis que la livre sterling bénéficiait du déploiement rapide des vaccins au Royaume-Uni.

Le bilan du trimestre est bien moins brillant pour l'euro, qui a perdu près de 4% de sa valeur en trois mois face au billet vert avec la dégradation des perspectives de reprise et le décalage conjoncturel croissant entre la zone euro et les Etats-Unis.

Pour le real brésilien et la livre turque, la baisse avoisine 10% sur le trimestre.

"Tout est lié au découplage entre les Etats-Unis et le reste du monde", dit Gilles Moëc, l'économiste en chef d'Axa, en soulignant que la croissance américaine devrait dépasser 6% cette année, du jamais vu depuis 1984, et surclasser celle de la Chine pour la première fois depuis plus de 20 ans.

Les espoirs de réouverture des entreprises ont profité au pétrole et aux métaux industriels comme le cuivre mais l'or a perdu du terrain, subissant même son pire début d'année depuis 1982. Le palladium et le platine, eux, ont pris entre 5% et 10% avec l'essor de la demande de voitures électriques.

Parallèlement, le blocage pendant six jours du canal de Suez a fait doubler le prix du transport maritime.

Plus imprévisible encore que la fermeture de l'un des axes de transport stratégiques du commerce mondial, on retiendra aussi le doublement de la valeur du bitcoin BTCUSD et surtout la bataille entre la coalition d'investisseurs individuels née sur les forums en ligne et des "hedge funds" spécialistes de la vente à découvert.

Ce phénomène dit des "meme stocks" a permis à la chaîne de magasins de jeux vidéo GameStop GME de gagner jusqu'à 2.700% en janvier. Le titre affiche encore une hausse de 950%, contre +3% pour l'indice mondial MSCI sur la période.

Et si les amateurs d'investissements atypiques ne sont pas encore rassasiés, ils peuvent désormais se tourner vers le nouveau marché des oeuvres d'art numériques: l'une d'elles s'est vendue ce mois-ci pour près de 70 millions de dollars. L'acheteur est un spécialiste des cryptoactifs connu sous le pseudonyme de "Metakovan".

"Si l'on compare au caractère inhabituel des catalyseurs du premier trimestre - une vague démocrate de dernière minute, un plan de relance américain d'une ampleur inattendue de 1.900 milliards de dollars, les meme stocks et l'éclatement de quelques petites bulles - le deuxième trimestre sera probablement moins théâtral", résume John Normand, stratège multi-actifs de J.P. Morgan.

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