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Les maraîchers européens envisagent d'abandonner leur récolte en raison de la crise énergétique

Emmanuel Lefebvre produit chaque année des milliers de tonnes d'endives sur son exploitation du nord de la France, il pourrait toutefois abandonner sa récolte cette année en raison des coûts énergétiques que la congélation des bulbes récoltés nécessite.

Certains maraîchers d'Europe du Nord et de l'Ouest envisagent d'interrompre leur activité en raison de la crise énergétique qui frappe la région, ce qui pourrait encore menacer les réserves de denrées alimentaires.

La hausse des prix de l'électricité et du gaz va frapper de plein fouet la production de tomates, de poivrons ou encore de concombres, qui sont cultivés sous serre durant l'hiver, ainsi que celles de pommes, d'endives et d'oignons, qui doivent être conservés au frais.

La culture de l'endive est particulièrement énergivore: une fois les bulbes récoltés, ils sont conservés dans des chambres froides avant d'être replantés dans des bacs placés dans des salles où la température et l'hygrométrie sont contrôlées.

"Aujourd'hui nous sommes vraiment dans une impasse totale et on se demande si on va récolter ce qui est aux champs cet hiver", a déclaré Emmanuel Lefebvre à Reuters.

Les agriculteurs européens alertent sur les risques de pénuries. Les incertitudes sur la production, et la hausse des prix font craindre que les supermarchés ne s'approvisionnent davantage auprès des producteurs qui se trouvent dans des pays comme le Maroc, la Turquie, la Tunisie et l'Egypte, où le climat est plus doux.

La hausse des prix du gaz frappe particulièrement les maraîchers cultivant leurs légumes sous serre, selon les agriculteurs.

Deux agriculteurs français qui doivent renouveler leur contrat d'électricité pour 2023 ont indiqué que les prix qui leur étaient proposés étaient dix fois supérieurs à ceux de 2021.

"Dans les semaines à venir, je vais planifier la saison, mais je ne sais pas ce que je vais faire", a déclaré Benjamin Simonot-De Vos, qui cultive des concombres, des tomates et des fraises en Seine-et-Marne, au sud de Paris.

"Si rien n'est fait ça ne sert à rien de repartir sur une saison, ce n’est pas tenable".

CAP SUR LE SUD

En plus de la hausse des coûts de l'énergie, les agriculteurs font également face à l'augmentation des prix des engrais, des emballages et du transport.

"Les coûts de production ont augmenté d'environ 30%", explique Johannes Gross, directeur adjoint des ventes de la coopérative allemande Reichenau-Gemüse, dont les serres couvrent quelque 60 hectares.

L'énergie représente entre la moitié et les deux-tiers des coûts supplémentaires, a-t-il ajouté.

"Certains de nos collègues envisagent de ne pas utiliser leurs serres afin de maintenir leurs coûts aussi bas que possible. Personne ne sait ce qui arrivera l'an prochain", a dit Johannes Gross.

Des pays comme l'Espagne, qui connaissent un fort ensoleillement, sont également touchés. Les producteurs espagnols de fruits et légumes ont observé une hausse de 25% du prix des engrais.

Pour Jack Ward, directeur général de la British Growers Association, il est inévitable que la production de fruits et légumes soit déplacée vers des climats plus chauds.

"La production va être de plus en plus déplacée vers le sud, de l'Espagne vers le Maroc et certaines parties de l'Afrique", a-t-il estimé.

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